26.
Il s’en fallut peu que d’un autre côté l’Orient ne fût entièrement ruiné. Les Huns s’étant emparés, de la manière que nous l’avons dit, des terres qui sont au-delà du Danube, les Scythes ne pouvant résister à une si terrible inondation, supplièrent Valens, qui régnait alors, de les recevoir en Thrace comme ses alliés et ses sujets, et lui promirent de lui obéir en tout ce qu’il aurait pour agréable de leur commander. Valens gagné par ces promesses les reçut, et s’imaginant qu’il aurait un gage assuré de leur fidélité en la personne de leurs enfants, il les envoya en Orient sous la conduite de Julius, sur l’adresse duquel il se reposa du soin de les garder et de les instruire. Julius les dispersa en plusieurs villes, de peur que s’ils demeuraient dans le même lien ils ne fussent capables de faire quelque entreprise contre le bien de l’état. Ces jeunes étrangers étant devenus grands, apprirent les mauvais traitements que leurs compatriotes avaient reçus en Thrace, et se mandèrent secrètement les uns aux autres la résolution qu’ils avalent prise de se venger. Julius appréhendant qu’ils n’exécutassent leur dessein, et ne sachant que faire pour le détourner, ne jugea pas à propos d’en donner avis à Théodose, tant parce qu’il était alors en Macédoine, que parce qu’il était nouvellement parvenu à l’empire, et que ce n’était pas de lui mais de Valens qu’il avait reçu l’ordre de veiller sur la conduite de cette jeunesse étrangère. Il en écrivit donc au sénat de Constantinople, et le sénat lui ayant laissé la liberté d’en disposer de la manière qu’il croirait la plus avantageuse au bien de l’état, voici ce qu’il fit pour détourner le danger dont les villes étaient menacées. Il assembla les principaux chefs, prit leur serment, et leur découvrit son dessein. Il fit à l’heure même publier par toutes les villes que l’empereur voulait attacher les Barbares à son service, et leur donner de l’argent et des terres, et qu’à cet effet ils se rendissent à certain jour dans les Métropoles. Les Barbares s’adoucirent un peu à cette nouvelle, et trompés par l’espérance ils perdirent l’envie qu’ils avaient de se soulever, et se rendirent en foule aux lieux qui leur avaient été marqués. Les soldats s’emparèrent des maisons qui répondaient aux places publiques, et jetèrent, du haut des toits, des traits et des pierres sur ces étrangers, à mesure qu’ils entrèrent, jusqu’à ce qu’ils les eussent tous tués, et jusqu’à ce que par leur mort ils eussent délivré les villes de la crainte de leur révolte.
