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Jul. Or, puisqu'il est certain que les personnes baptisées n'éprouvent dans leurs corps aucun des effets que nous venons d'énumérer; puisque, d'autre part, il a été démontré avec la lumière de l'évidence même, que la rédemption telle que vous l'entendez n'a pu, c'est-à-dire n'a dû s'accomplir sans opérer ce genre de guérisons : confesse donc, ou bien que les maux énumérés par nous tout à l'heure, ne sont pas la suite du péché, et par là même qu'ils ne sont pas non plus des blessures faites à la nature : et alors on saura quelle est la nature véritable de la grâce, puisque manifestement elle n'a opéré aucun changement dans ce qui est l'état normal de l'humanité : ou bien confesse que l'on ne doit reconnaître aux mystères du Christ aucun pouvoir de guérison, puisque, parmi un si grand nombre de maladies dont, suivant toi, la nature humaine est atteinte, ils n'ont pu en guérir même une seule.
Aug. Vous devriez au contraire, si les lumières de la saine raison pouvaient encore vous guider , vous devriez reconnaître ici quelle a été l'énormité de ce péché qui est entré dans le monde par un seul homme et qui a passé avec la mort dans tous les hommes : puisque, avant le moment où elles entrent dans la vie future, les personnes baptisées elles-mêmes, quoique la souillure du péché originel soit effacée de leurs âmes, ne sont pas complètement affranchies des maux qui pèsent sur nous depuis notre naissance jusqu'à notre mort; et que dans la vie présente, alors même que nous avons reçu la promesse des biens éternels, nous devons encore être éprouvés par des maux de toute sorte. Car, si nous obtenions immédiatement la récompense que mérite notre foi, cette foi elle-même cesserait aussitôt d'exister; puisqu'elle consiste précisément à supporter avec une pieuse résignation les maux présents que l'on voit et à attendre fidèlement et patiemment les biens promis que l'on ne voit pas.
