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Jul. Or, puisqu'il parle de péchés nombreux, il ne songe même pas au péché unique des Manichéens; ou, en d'autres termes, au péché des partisans de la transmission.
Aug. Mais certes, quelle que soit l'opiniâtreté de ton esprit, tu reconnaîtras que, si une multitude d'hommes se présentaient au sacrement de la régénération le jour même où ils ont péché pour la première fois, on pourrait qualifier de nombreux les péchés qu'ils auraient commis ainsi par leur volonté personnelle, quoique en réalité chacun de ces hommes ne fût coupable que d'un seul péché; et cependant, je ne dis pas par cet argument, mais par cette argutie impossible que vous prétendez appuyer sur les paroles de l'Apôtre, vous excluez tons ces hommes de la participation à la grâce qui justifie d'un grand nombre de péchés ; car, suivant vous, tout homme qui est coupable d'un péché seulement, ne saurait avoir aucune part au bienfait qu'elle procure. A combien plus forte raison donc est-il permis de parler de péchés nombreux n, quand il s'agit à la fois du péché originel et des péchés plus ou moins multipliés commis par la volonté personnelle de chacun ? Et cependant les hommes sont délivrés de tous ces péchés par la grâce dont il a été dit qu' « elle justifie en effaçant une multitude de péchés[^3] ». Adam « a existé, et nous avons tous existé en lui; Adam a péri, et tous ont péri en lui ». C'est Ambroise qui a parlé ainsi[^1] ; et, malgré tes calomnies, Ambroise n'était point un manichéen. Cyprien a dit que, par leur naissance première, les enfants contractent la souillure de la mort antique[^2]; malgré tes calomnies, Cyprien n'était point manichéen. Hilaire a dit que tous les hommes ont péché en Adam seul; malgré tes calomnies, Hilaire n'était point un disciple de Manès. Tes calomnies ne réussiront point à prouver que l'Eglise dans le sein de laquelle ces docteurs avaient appris cette doctrine., était une Eglise manichéenne; cette Eglise au contraire était catholique, aujourd'hui encore elle continue de mériter ce titre, et voilà précisément pourquoi elle n'a pu vous conserver dans son sein, vous dont les pensées et les discours sont contraires à cette doctrine; et pour demeurer elle-même catholique, elle a protégé par votre condamnation la faiblesse de ses petits enfants.
Rom. V, 16.
Liv.VII sur saint Luc, XV, 24.
Epît. LXIV, à Fidus.
