103.
Jul. «Mais », dit saint Paul, « il n'en est pas du don comme du péché venu par un seul. Car le jugement de condamnation vient d'un seul; tandis que la grâce de la justification délivre d'un grand nombre de péchés[^1] ». Tu joins à ces paroles de l'Apôtre ton interprétation personnelle conçue en ces termes : « Qu'est-ce à dire : Le jugement de condamnation vient d'un seul », si ce n'est : « vient d'un seul péché? » puisque saint Paul ajoute : « La grâce au contraire délivre d'une multitude de péchés. Que nos adversaires disent comment cette condamnation est prononcée pour un seul délit, si ce n'est parce que le péché originel, qui a passé dans tous les hommes, suffit à lui seul pour rendre cette condamnation légitime. La grâce de la justification délivre au contraire d'une multitude de péchés, parce qu'elle remet non-seulement ce péché unique, contracté dès notre origine, mais aussi les autres que chaque homme en particulier ajoute à celui-là, parle mouvement de sa volonté personnelle. Car, si à cause du péché d'un seul la mort a régné a par un seul, à plus forte raison ceux qui reçoivent l'abondance de la grâce et de la justice, régneront-ils dans la vie par un seul, Jésus-Christ. C'est pourquoi, de même que tous les hommes sont tombés dans la condamnation par le péché d'un seul, de même aussi tous reçoivent la justification a de la vie par la justice d'un seul[^2] ». Puis, comme si tu avais prouvé quelque chose en citant ces paroles, tu parles de nous en des termes insultants : « Qu'ils persévèrent encore dans leurs vaines argumentations et qu'ils continuent à enseigner que cet homme a unique dont parle l'Apôtre n'a pas transmis son péché avec son sang, mais qu'il a seulement donné un exemple de péché. Comment donc tous les hommes sont-ils tombés dans la condamnation par le péché d'un seul, et non pas plutôt par la multitude de péchés qu'ils commettent personnellement? N'est-ce pas précisément parce que ce péché suffirait à lui seul pour conduire les hommes à la damnation, lors même que ceux-ci n'y ajouteraient aucun péché personnel; comme il conduit réellement à la damnation les enfants qui meurent après avoir pris naissance d'Adam , mais avant d'avoir reçu une seconde naissance en Jésus-Christ? Pourquoi donc notre adversaire nous adresse-t-il cette question dont il ne veut pas recevoir la solution de la bouche de l'Apôtre : comment l'enfant se trouve-t-il coupable de péché? est-ce par un acte de sa volonté, est-ce par un effet de l'acte conjugal ou par suite d'une faute commise par ses parents? Qu'il écoute (et qu'il apprenne à se taire), qu'il écoute comment les enfants se trouvent coupables de péché ; voici les paroles de saint Paul : Tous les hommes sont tombés dans la condamnation par le péché d'un seul[^3]». Nous savons que tu né redoutes rien tant que les interrogations qui ont pour objet de te faire dévoiler tes sentiments et tes pensées secrètes : c'est pour cela en effet que vous cherchez avant tout à obtenir des puissances séculières que la question présente ne soit pas discutée dans un jugement en forme; car vous comprenez que vous devez recourir à la force, puisque vous ne trouvez aucun appui dans les principes de la raison.
Aug. Veux-tu ne pas craindre la puissance? Fais le bien[^4]. Mais ce n'est pas faire le bien que de répandre et d'enseigner hautement une doctrine hérétique en contradiction avec la doctrine de l'Apôtre. Pourquoi réclamer encore la discussion d'une chose qui a été jugée par le Siège apostolique; qui a été jugée aussi par l'assemblée des évêques de Palestine, par cette assemblée où sans aucun doute Pélage, auteur de votre erreur, aurait été condamné s'il n'avait condamné ces mêmes opinions que tu défends? Une hérésie condamnée par les évêques ne doit plus être l'objet d'un jugement; elle doit être réprimée par les puissances chrétiennes.
Rom. V, 16.
Rom. V, 17, 18.
Des Noces et de la Conc., liv. II, n. 46.
Rom. XIII, 3.
