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Jul. La grâce du Seigneur Jésus-Christ au contraire n'a pas été donnée de telle sorte qu'elle dût apporter à chacun de nos péchés, comme à autant de blessures, un remède particulier de miséricorde, et nous accorder la rémission de chacun de nos péchés par autant de baptêmes différents: mais, grâce à l'efficacité toute-puissante du remède qu'elle apporte à nos crimes, c'est-à-dire aux oeuvres de la volonté mauvaise, elle opère une guérison tellement générale que les différentes espèces de souillures sont effacées par une seule et même consécration.
Aug. De quelque manière que tu prétendes que la grâce du Seigneur Jésus-Christ est donnée, tu exclus les petits enfants de toute participation à cette grâce, quand tu déclares qu'ils ne sont point sauvés par elle ; car vous divisez arbitrairement les deux noms du Seigneur, de telle sorte qu'il semble être Christ à l'égard des petits enfants à cause du royaume de Dieu auquel vous reconnaissez que ceux-ci ne peuvent parvenir, s'ils n'ont reçu le baptême; mais, en tant que Jésus, il leur est complètement étranger, parce qu'il n'opère pas en eux ce que ce nom signifie. Il est écrit en effet : « Tu lui donneras le nom de Jésus », et l'ange voulant faire connaître la raison pour laquelle le Seigneur doit être appelé Jésus, ajoute aussitôt : « Car c'est lui qui sauvera son peuple des péchés dont il est coupable[^1] ». Puisque vous niez que le Seigneur sauve réellement les petits enfants, vous déclarez par là même que le nom de Jésus ne se rapporte pas à eux, et qu'ils sont étrangers à son peuple ; et vous osez protester avec colère, parce que c'est vous-mêmes au contraire que l'on exclut du milieu de ce peuple ! D'autre part, et pour ce qui regarde les péchés volontaires, de même que le jugement de condamnation nous frappe pour une multitude, de même aussi la grâce de la justification nous délivre d'un grand nombre de ces péchés. Pourquoi donc l'Apôtre dit-il : « Le jugement de condamnation vient d'un seul (péché), mais la grâce de la justification délivre d'un grand nombre de péchés »; si ce n'est parce que en cet endroit il n'oppose pas la volonté bonne à la volonté mauvaise, ni l'imitation du bien à l'imitation du mal, mais la régénération à la génération première? Car, si, d'une part, notre génération première fait prononcer contre nous un jugement de condamnation pour un seul péché; d'autre part aussi, notre régénération nous confère une grâce de justification qui nous délivre d'une multitude de péchés. La pensée que l'Apôtre a voulu exprimer en cet endroit est tout à fait manifeste ; écoutez ses paroles avec un esprit soumis et vous cesserez vous-mêmes de parler pour obéir à un esprit de contention.
- Matt. I, 21.
