69.
Jul. Mais poursuivons maintenant la discussion des paroles de notre adversaire, afin de montrer, par les développements que l'écrivain sacré a donnés à sa pensée, et comme on a pu déjà en juger par plusieurs raisons décisives, quelle est celle des deux doctrines qui se trouve conforme aux enseignements de l'Apôtre. « Les paroles qui suivent dans le texte de l'Apôtre ont-elles une autre signification ? Après s'être exprimé ainsi, il ajoute : Le péché a existé dans le monde jusqu'à la loi[^2] : en d'autres termes, la loi elle-même n'a pu mettre fin au péché. Mais le péché n'était pas imputé, quand la loi n'existait pas. Le péché subsistait donc alors, mais il n'était pas imputé, par la raison que ce qui n'était pas connu ne pouvait pas être imputé : car, suivant l'expression de saint Paul en un autre endroit : La connaissance du péché nous est donnée par la loi[^3]. Mais la mort, dit-il, a régné depuis Adam jusqu'à Moïse ; ces derniers mots ont le même sens que ces autres employés précédemment : jusqu'à la loi ; jusqu'à Moïse, dit l'Apôtre, non pas en ce sens que le péché ait cessé ensuite d'exister ; mais en ce sens que la loi donnée par Moïse n'a pu elle-même détruire l'empire de la mort, laquelle, assurément, ne règne que par le péché. D'autre part, la, mort n'exerce sa puissance que pour envoyer les hommes ses sujets à une seconde mort qui durera éternellement. Elle a donc régné; et sur qui? Sur ceux mêmes, dit saint Paul, qui n'avaient point péché par une prévarication semblable à celle d'Adam, lequel est la figure de celui qui devait venir[^4]. Quel est celui qui devait venir, sinon le Christ ? et comment Adam est-il la figure du Christ , si ce n'est par opposition ? comme saint Paul le déclare en un autre endroit : De même que tous meurent en Adam, de même aussi tous revivront en Jésus-Christ[^5]. Dans celui-là la mort, dans celui-ci la vie : voilà comment le premier est la figure du second. Toutefois, Adam n'est pas la figure du Christ sous tous les rapports absolument : de là ces paroles que l'Apôtre ajoute ensuite: Mais il n'en est pas du don comme du péché. Car si une multitude d'hommes sont morts à cause du péché d'un seul, la miséricorde et le don de Dieu se sont répandus d'une manière bien plus abondante sur une multitude d'autres hommes, par la grâce d'un seul homme, Jésus-Christ[^1]. Qu'est-ce à dire : Se sont répondus d'une manière bien plus abondante ? L'Apôtre s'exprime ainsi, parce que tous ceux qui sont délivrés par Jésus-Christ, subissent, à causé d'Adam, une mort temporaire, mais ils vivront éternellement à cause de Jésus-Christ[^6]». Tu avais déclaré que les paroles qui suivaient dans l'Epître aux Romains n'avaient d'autre objet que d'enseigner l'existence du péché originel: nous avons démontré que les premières de ces paroles n'établissent point cette existence, puisque l'Apôtre commence par déclarer que le péché a été transmis par un seul homme, et non point par deux personnes.
Aug. Nous avons déjà répondu à cette objection, et tu continues à dire des choses qui ne signifient rien : cela du reste n'est pas étonnant ; tu ne sais pas encore ce que j'ai répondu : quand tu le sauras, si tu ne veux pas renoncer à tes vains discours pour enseigner la vérité, c'est alors seulement, que ton impudence sera à son comble.
Rom. V, 13.
Id. III, 20.
Id. V, 14.
I Cor. XV, 22.
Rom. V, 15.
Des Noces et de la Conc., liv. II, n. 46.
