175.
Jul. D'autre part, le mot tous est souvent employé dans le sens de un grand nombre; nous en trouvons une multitude d'exemples dans l'Écriture; ainsi le Psalmiste dit : « Tous se sont écartés de leur voie, tous sont devenus coupables » ; et un peu plus loin il ajoute : « Ils dévorent mon peuple comme un morceau de pain[^2] » ; montrant ainsi que ce peuple n'était pas compris dans cette universalité représentée par lui comme occupée à faire le mal. Nous trouvons pareillement dans l'Évangile ce récit : « Et tout le peuple criait : Crucifie-le ! crucifie-le ![^3] » Et cependant , malgré la généralité de cette expression, elle ne s'applique nullement aux Apôtres, ni à Nicodème, ni aux saintes femmes. Saint Paul lui-même désignera tout à l'heure sous le nom de multitude ceux qu'il désigne ici comme étant l'universalité du genre humain.
Aug. Je t'ai déjà répondu à ce sujet que le mot tous peut, sans contradiction aucune, être interprété dans le sens de un grand nombre, parce que quand on parle de tous les hommes, il s'agit non pas d'un petit nombre, mais d'un grand nombre d'hommes. Et ce que tu as dit en citant ces paroles du Psalmiste: « Tous se sont écartés de leur voie, tous sont devenus coupables », est parfaitement vrai; le Psalmiste distingue les enfants des hommes qui tous se sont écartés de leur voie, des enfants de Dieu qui ne se sont pas égarés ainsi et qui sont dévorés par ceux-là : Dieu a jeté un regard sur les enfants des hommes, tous ceux-ci se sont écartés de leur voie; mais les enfants de Dieu ne sont pas compris dans ce nombre. Conséquemment, parmi tous ces enfants des hommes écartés de leur voie, se trouvait aussi tout ce peuple qui criait: « Crucifie-le ! crucifie-le ! » Mais ceux qui croyaient déjà en Jésus-Christ ne faisaient en aucune manière partie de ce peuple. Explique, si tu le peux, ces paroles qui sont inexplicables dans ton système : « Un seul est mort pour tous » ; et ose dire que tous ceux pour qui Jésus-Christ est mort , n'étaient pas eux. mêmes frappés de mort; quoique l'Apôtre t'oblige aussitôt à garder le silence et qu'il étouffe ta voix audacieuse, en montrant que la conséquence de cette maxime est celle-ci : « Donc tous sont morts ». Cesse de dénaturer ainsi le témoignage de l'Apôtre , cesse de donner à ses paroles une interprétation qui ne te permet pas d'entendre celles-ci : « Si un seul est mort pour tous, donc tous sont morts[^1] ». La mort a passé avec le péché dans tous ces derniers, par celui en qui tous sont frappés de mort ; parmi eux se trouvent même les enfants, puisque Jésus-Christ est mort pour les enfants aussi ; et Jésus-Christ est mort pour tous, précisément parce que tous sont morts. Quelque raisonnement que tu cherches à établir, à quelque subterfuge que tu aies recours, quelques paroles de l'Apôtre que tu t'efforces de faire disparaître ou de dénaturer, tu ne réussis pas à prouver que les enfants n'ont pas été frappés de la mort qui est le châtiment du péché; car tu n'oses affirmer que Jésus-Christ n'est pas mort pour les enfants eux-mêmes.
Id. XIII, 3, 4.
Matt. XXVII, 23 ; Luc, XXIII, 21.
II Cor. V, 14, 15.
