101.
Jul. Saint Paul dit que la grâce de Jésus-Christ a été plus abondante que la faute du premier homme : ce n'est donc point la nature, ni la génération, ni la fécondité qu'il accuse, mais la volonté, mais le choix du mal et la perversité de la conduite.
Aug. Si la génération n'a causé aucun dommage, la régénération n'apporte aucun bienfait; si la nature n'est pas flétrie, Jésus-Christ n'est pas le Sauveur des petits enfants ; si c'est par sa volonté personnelle, que chacun mérite la récompense ou le châtiment, comment les enfants ont-ils mérité que Jésus-Christ les mît en possession du royaume de Dieu, puisqu'ils n'ont fait aucun usage de leur volonté propre, soit pour le bien, soit pour le mal? Enfin l'Apôtre a rapproché du mot péché le nom d'Adam, et non pas celui du démon; il a rapproché du mot justice le nom de Jésus-Christ, et non pas celui d'Abel; pour faire comprendre qu'il ne voulait point parler d'exemples et d'imitation, mais de génération et de régénération ; si donc Adam ne transmet pas aux hommes son péché avec son sang, Jésus-Christ ne donne pas non plus la justice aux enfants qui sont régénérés en lui; car les enfants qui ont été régénérés comme ceux qui ont été seulement engendrés, n'ont encore fait aucun usage de leur volonté personnelle. Allez maintenant si vous voulez, et, si vous l'osez, enseignez publiquement que la justice n'est point donnée aux enfants; qu'ils ne la posséderont pas même quand ils auront obtenu une demeure dans ce royaume où l'on verra les cieux nouveaux et la terre nouvelle dont parle l'Ecriture, et dans lesquels habite la justice[^1] : ou bien, dans l'enivrement et le délire que vos opinions, pareilles à un vin généreux, font naître en vous, déclarez que les enfants posséderont à la vérité la justice dans ce royaume, mais par suite d'actes méritoires de leur volonté propre, et non point par un bienfait gratuit de la grâce divine. Si vous n'osez tenir ce langage (car vous reconnaissez que la vie présente est le moment où l'on acquiert des mérites, et que dans l'éternité on reçoit seulement des récompenses) ; pourquoi hésitez-vous à reconnaître, ou pourquoi ne voulez-vous pas reconnaître que ces enfants ont pu, sans l'avoir mérité par aucun acte mauvais de leur volonté personnelle, participer au péché d'Adam de la même manière qu'ils doivent un jour participer à la justice de Jésus-Christ, sans avoir précédemment mérité cette faveur par aucun acte de bonne volonté?
- II Pierre, III, 13.
