CHAPITRE X. AVEU DÉGUISÉ DE PÉLAGE RELATIVEMENT A LA GRACE.
11. L'auteur s'adresse à lui-même, comme venant d'un interlocuteur, l'objection suivante: « L'homme », direz-vous, « peut être sans péché, mais par la grâce de Dieu ». Puis, en forme de réponse il ajoute: «Je félicite votre humanité d'avoir changé d'opinion; car tout à l'heure vous combattiez mon assertion, et maintenant, non content de ne plus la combattre, vous l'embrassez et vous ne la refusez pas de la prouver. En effet, dire de d'homme qu'il peut, mais par tel où tel a moyen, n'est-ce pas d'abord avouer qu'il a, ce pouvoir, n'est-ce pas même montrer la p source et l'étendue de ce pouvoir ? Le meilleur moyen de prouver la possibilité d'une chose, n'est-ce pas de formuler les conditions ou les qualités de cette possibilité? car des qualités doivent nécessairement avoir un objet ». Il se pose ensuite une nouvelle objection: «Mais », me direz-vous, « vous paraissez, dans ce passage, rejeter la grâce de Dieu, puisque vous n'en faites aucune mention ». Il répond : « Puis-je donc rejeter une chose que j'avoue, qu'il m'est nécessaire d'avouer, et qui, seule, rend possible la chose dont je parle; vous, au contraire, qui niez cette chose, ne niez-vous point, par là même, ce qui lui donne toute sa réalité ? »
Notre auteur oublie qu'il répond à un interlocuteur qui ne nie pas, et dont il a ainsi formulé l'objection: « L'homme, peut être sans péché, mais par la grâce de Dieu ». Et du moment que cette possibilité n'est pas niée par son adversaire, pourquoi s'ingénier de cette sorte à l’établir? Toutefois, on ne saurait en douter, son interlocuteur, qu'il abandonne après lui avoir prêté un aveu complet, n'était pour lui qu'une occasion plus ou moins directe d'attaquer ceux qui soutiennent que l'homme ne saurait être sans péché. Mais que nous importe ? Qu'il s'attaque à qui il voudra, pourvu qu'il avoue ce qu'on ne saurait nier sans une impiété. manifeste, à savoir que l’homme, sans la grâce, ne saurait être exempt de péché. Il dit donc: « Que ce soit par une grâce, par un secours ou par miséricorde, que l'homme peut être sans péché, il suffit à ma thèse que l'on avoue cette possibilité ».
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