CHAPITRE XXIV. JÉSUS-CHRIST EST MORT LIBREMENT, DIEU SAIT TIRER LE BIEN DU MAL.
26. L'auteur nous objecte que « Jésus-Christ a pu mourir quoiqu'il fût exempt de tout péché». Ne pouvons-nous pas dire de sa naissance qu'elle est due à la puissance de sa miséricorde, et non pas à la condition de la nature? De même il est mort par sa propre puissance, et sa mort a été le prix de notre rachat. Cela seul, du reste, suffit pour les convaincre d'erreur quand ils exaltent la nature humaine au point de soutenir que le prix de la mort de Jésus-Christ n'est nullement nécessaire au libre arbitre pour s'arracher à la puissance des ténèbres et mériter le royaume éternel. Cependant, à l'approche de sa passion, le Sauveur s'écriait : « Voici venir le prince de ce monde, et il ne trouvera rien en moi » ; c'est-à-dire aucun péché qui lui donne sur moi le moindre droit de me faire mourir. « Mais afin que tous sachent que je fais la volonté de mon Père, levez-vous, sortons d'ici1 » ; c'est bien comme s'il leur eût dit: de meurs; non point que j'y sois contraint par le péché, mais parce que je veux avant tout obéir.
27. L'auteur soutient « que le mal ne saurait être la cause d'aucun bien». Le châtiment est un mal, et néanmoins il est pour beaucoup la cause de leur conversion. Il est donc des maux qui deviennent utiles par l'ineffable miséricorde de Dieu. Etait-ce de quelque bien que le Psalmiste parlait quand il s'écriait: « Vous avez détourné de moi votre face et j'ai été confondu ? » Il était dans l'affliction, mais cette affliction fut pour lui un puissant remède contre l'orgueil. Quand il était dans l'abondance, il avait dit : « damais quoi « que ce soit ne pourra m'ébranler2 ». Et il s'attribuait ainsi ce qu'il ne tenait que de Dieu. Car ce qu'il possédait, ne l'avait-il pas reçu' ? Il fallait donc lui montrer de quelle source unique il pouvait attendre le remède, afin qu'il reçût dans l'humilité ce qu'il avait perdu par son orgueil. Aussi l'entendons-nous s'écrier: « Seigneur, vous avez donné la force à ma beauté ». Pourtant je disais dans mon abondance: « Je ne serai point ébranlé », quand ce bienfait ne venait que de vous et non pas de moi. Enfin « vous avez détourné de moi votre face, et j'ai été confondu3 ».
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