CHAPITRE LXIV. SAINT JEAN CHRYSOSTOME ET SAINT XYSTE.
76. Saint Jean, évêque de Constantinople, est également cité quand il affirme « que le péché n'est point une substance, mais un acte mauvais ». Et qui donc en a jamais douté ? Il ajoute : « Parce que le péché n'est pas naturel et qu'il est le fruit du libre arbitre, il a dû être porté contre lui une loi qui le réprouve et le condamne ». Et qui donc l'a jamais nié? Ce qui est en question pour nous, c'est la nature humaine viciée par le péché, c'est la grâce de Dieu, laquelle seule peut nous guérir par l'application que nous en fait Jésus-Christ; grâce dont nous n'aurions pas besoin si notre nature était saine. Comment donc notre auteur ose-t-il soutenir qu'elle n'est pas viciée, qu'elle se suffit par son libre arbitre et qu'elle peut ne pas pécher ?
77. Nous savons tous que notre adversaire revendique pour lui l'autorité du bienheureux Xiste, évêque de l'Eglise romaine et martyr du Seigneur. Ce pontife aurait dit : « En donnant le libre arbitre aux hommes, Dieu leur a permis de vivre sans péché et de devenir ainsi semblables à Dieu ». Or, l'oeuvre du libre arbitre, c'est d'écouter la voix de Celui qui l'appelle, de se laisser persuader, et de demander à Dieu le secours pour ne pas pécher. Il s'agit pour les hommes « de devenir semblables à Dieu » ; or, le seul moyen de devenir semblables à Dieu, c'est la charité répandue dans nos coeurs, non point par la possibilité de notre nature, non point par le libre arbitre qui est en nous, mais par le Saint-Esprit qui nous a été donné.
Le même martyr dit également : « Le temple saint à présenter à Dieu, c'est l'âme pure; et l'autel le plus excellent à ériger en son honneur, c'est un coeur pur et sans péché ». Or, qui ne sait que pour amener un coeur pur à cette perfection, et pour opérer ce renouvellement quotidien de l'homme intérieur, le moyen indispensable, c'est la grâce de Dieu par Jésus-Christ Notre-Seigneur ? Saint Xiste dit également : « L'homme chaste et sans péché a reçu de Dieu le pouvoir de devenir enfant de Dieu ». Arriver à cet état de pureté et d'innocence, c'est le but suprême que se proposent les vrais chrétiens; mais ils savent qu'ils ne peuvent l'atteindre sans le concours efficace du Médiateur entre Dieu et les hommes, Jésus-Christ Dieu et homme. Or, le saint pontife, s'adressant à ceux qui seraient parvenus à cet heureux état, leur rappelle que ce n'est point par leur propre pouvoir qu'ils y sont parvenus, mais par la grâce que Dieu leur a conférée; car, que pouvait leur nature viciée et dépravée, et n'est-ce pas à nous que s'adressent ces paroles de l'Evangile . « Quant à ceux qui l'ont reçu, il leur a donné le pouvoir de devenir les enfants de Dieu1 ? » Ils ne l'étaient point par nature et ils ne le seraient point devenus si, avec la foi en Jésus-Christ, ils n'avaient en même temps reçu ce pouvoir. Or, ce pouvoir n'appartient qu'à la force de la charité, laquelle n'est en nous que par le Saint-Esprit qui nous a été donné.
Joan, I, 12. ↩
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