CHAPITRE LIX. MÊME SUJET.
69. Quelques-uns disaient : « Qui donc ne voudrait être sans péché, si cet heureux état était en la puissance de l'homme? » L'au1eur répond avec beaucoup de justesse : « Cette objection prouve précisément la possibilité en question, car beaucoup d'hommes et même tous voudraient être sans péché ». Il ne lui reste plus qu'un pas à faire, et nous aurons la paix; qu'il avoue ce qui peut nous rendre sans péché. C'est la grâce de Dieu par Jésus-Christ Notre-Seigneur; mais jusque-là il a refusé de dire que si nous pouvons être sans péché, c'est par le secours de cette grâce que nous implorons dans la prière. Il peut se faire qu'il soit intérieurement d'accord avec nous, mais jusqu'à preuve du contraire, qu'il nous permette d'en douter. Pourquoi donc sur une matière qui soulève contre lui une si grande réprobation, se donner le droit de confesser et de dire le contraire de ce qu'il pense ? En le sommant de se prononcer, lui demandait-on un si grand sacrifice, puisque, prenant le rôle de ses adversaires, il se proposait de réfuter et de dévoiler l'erreur? Pourquoi tant d'efforts uniquement en faveur de la nature ? Pourquoi soutenir qu'en vertu même de sa création l'homme pouvait ne pas pécher s'il l'eût voulu, de telle sorte que la possibilité de ne pas pécher découle pour l'homme uniquement et exclusivement du privilège et de la grâce de sa création? Par conséquent la grâce de Dieu par Jésus-Christ Notre-Seigneur n'a plus aucun caractère de nécessité soit pour guérir notre nature viciée, soit pour lui aider dans son insuffisance.
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