CHAPITRE LXIX. DIEU NE COMMANDE PAS L'IMPOSSIBLE.
83. Les préceptes du Seigneur sont très-bons, pourvu que nous en usions légitimement1. Par cela seul que nous croyons fermement que « Dieu juste et bon ne peut nous commander l'impossible », nous sommes avertis de ce que nous devons faire quand le précepte est facile,et de ce que nous devons demander quand il est difficile. Or tout est facile à la charité, car le joug est doux à celui-là seul qui n'a d'autre joug que celui de Jésus-Christ2. Il est dit également : « Et ses préceptes ne sont pas intolérables3 ». Que celui qui les trouverait trop lourds, veuille bien considérer que si Dieu nous déclare qu'ils ne le sont pas, c'est parce qu'il sait nous inspirer cet amour pour lequel rien n'est trop lourd et qui sait demander l'accomplissement de ce qui lui est prescrit. Telle est la pensée clairement exprimée dans le livre du Deutéronome, pour peu, du moins, que nous voulions l'envisager au point de vue de la piété, de la sainteté et de la foi ; car c'est ainsi que saint Paul lui-même l'a reproduite en ses termes : « La parole n'est point éloignée de vous; elle est dans votre a bouche et dans votre coeur (dans vos mains, disent les Septante, parce que c'est dans le coeur que se trouvent les mains spirituelles); « telle est la parole de la foi que nous vous prêchons4».
Conformément au précepte qui nous est imposé, convertissez-vous au Seigneur votre Dieu de tout votre coeur et de toute votre âme, et le commandement du Seigneur n'aura plus rien de lourd et d'écrasant. Un commandement d'amour peut-il donc être lourd ? Pour celui qui n'aime pas, tout précepte est un fardeau qui l'écrase; mais pour celui qui aime, il n'y a plus rien de lourd. Or il aime celui qui, selon l'avertissement donné à Israël, se convertit au Seigneur son Dieu de tout son coeur et de toute son âme. « Je vous donne un commandement nouveau : Aimez-vous les uns les autres5 ». « Celui qui aime son prochain a accompli la loi » ; « la plénitude de la loi c'est la charité6 ». Il est dit encore, et toujours dans le même sens : « S'ils marchaient dans les voies bonnes, ils trouveraient légères les voies de la justice7 ». Et ces autres paroles: « A cause de la parole sortie de vos lèvres, j'ai marché dans la voie difficile8 », ne prouvent-elles pas la vérité de chacune de ces deux propositions: Les voies de Dieu sont dures pour la crainte, mais elles sont légères à l'amour?
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