CHAPITRE LII. CONTINUATION DU MÊME SUJET.
60. Voyez encore quels obstacles il essaie de franchir pour soutenir son opinion. Il se pose à lui-même cette question : «Mais, direz-vous, à en croire l'Apôtre, la chair nous est contraire1 ». Il répond : « Comment peut-il se faire que la chair soit contraire à un homme baptisé, puisque, selon le même Apôtre, l'homme baptisé n'est plus dans la chair? » Voici ses paroles : « Pour vous, vous n'êtes plus dans la chair2 ». L'auteur affirme donc d'une manière formelle que la chair ne peut être contraire à ceux qui sont baptisés, et nous jugerons de la vérité de cette proposition dans le chapitre suivant. Pour le moment, comme il ne peut complètement oublier qu'il est chrétien quoiqu'il n'en ait qu'un très-faible souvenir, il ne se fait plus, avec la même ardeur, le champion de la nature. Que devient donc notre inséparable possibilité ? Est-ce que par hasard il n'y aurait pas encore de baptisés parmi les hommes ? Qu'il y prenne garde et qu'il redouble d'attention.
« Comment », dit-il, « peut-il se faire que la chair soit contraire à un homme baptisé?» La chair ne peut donc pas lutter contre un homme baptisé. Nous demandons sur ce point des explications. Car ces hommes baptisés possèdent cette nature humaine dont il prend si chaudement la défense. Il admet donc que cette nature a été viciée, puisqu'il parle du baptême que je comparerais volontiers à cette hôtellerie de l'Evangile d'où l'on sort parfaitement guéri des blessures reçues, et où l'on ne séjourne que pour obtenir, à l'aide du bon Samaritain, une guérison complète3. Or, s'il admet que dans ces hommes baptisés la chair fait la guerre, qu'il nous dise comment cela peut se faire, puisque la chair et l'esprit sont tous deux l'oeuvre d'un seul et même Créateur, et à ce titre au moins, oeuvre bonne et sainte. Ne faut-il pas que cette guerre ait pour cause un vice, fruit malheureux d'une volonté perverse? et pour que ce vice soit guéri, nous avons absolument besoin du concours de celui qui, après avoir été notre créateur, doit devenir notre sauveur. Ce concours, ce remède apporté par le Verbe fait chair afin d'habiter parmi nous4, si nous confessons tous qu'il est nécessaire aux petits et aux grands, aux enfants comme aux vieillards, toute controverse cesse, la question est résolue.
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