Chapitre CXXXVII.
Cependant, eux qui, sous le voile de l'amitié, songeaient à tromper le roi et machinaient leurs ruses et leurs pièges, fondirent à l'improviste sur sa nouvelle résidence, pour le faire périr. Mais Aschod, ayant été averti de leur dessein un peu auparavant, prit promptement la fuite, emmenant avec lui le fils de son frère Abas, en conséquence de cet avis, et se délivra ainsi des filets de ces chasseurs. Il marcha en avant et se rendit dans la province d'Oudie. Quand les autres arrivèrent (à Érazgavors), et ne purent y trouver ce qu'ils cherchaient ni ce qu'ils voulaient, ils furent extrêmement honteux, et après avoir resté quelque temps dans ce lieu abandonné, ils le pillèrent et repartirent. Bientôt une violente haine éclata entre eux, ainsi qu'il advient ordinairement entre gens qui se regardent comme très habiles en méchanceté. Vasag ; qui gouvernait en propre la principauté de Geghark'houni, eut, d'après mon opinion, l'esprit vivement frappé de la crainte que devait lui inspirer le ressentiment du roi ; car il adressa une demande à Aschod, pour obtenir qu'après s'être mutuellement fait un serment il eût un libre accès auprès de sa royale personne. Je reçus alors une lettre du roi et je la donnai à Vasag, qui se mit en route et arriva auprès d'Aschod. Ce prince le reçut sur l'ancien pied, comme un serviteur fidèle, et comme un frère chéri qui s'était confié à sa foi ; il le traita avec de grandes marques d'honneur. Mais ensuite, trompé par ceux qui disaient que Vasag avait reçu, par le moyen d'un cavalier rempli de toutes sortes de ruses, des lettres de l'autre roi Aschod, de Gourgen et du beau-père de notre Aschod, le roi le fit arrêter, charger de chaînes de fer et enfermer dans un fort nommé Gaien (Kaïean). J'adressai au roi de vives représentations à ce sujet ; je ne cessai de blâmer sévèrement la violation de son serment, la captivité de Vasag et l'occupation du territoire de ce dernier. Le roi ayant alors examiné lui-même le crime dont il croyait Vasag coupable, se décida, après l'avoir retenu prisonnier quelques jours, à le délivrer de sa prison et à le rétablir dans sa principauté. En conséquence, je donnai aussitôt mon absolution à Vasag, parce qu'il avait plutôt les défauts d'un enfant que ceux de la méchanceté, et parce qu'il n'avait réellement machiné aucune perfidie ; et ce fut ainsi qu'on le laissa libre d'aller en d'autres lieux jouir de la protection de la miséricorde céleste.
