Chapitre CLXV.
Cependant Nesr, qu'on nommait ordinairement Serpouk'h et que Youssouf avait envoyé avec le titre d'osdigan dans l'Arménie, se mit en marche, s'avança vers la ville de Nakhidchévan, y entra et y resta quelques jours, parce que sa femme se trouvait en cet endroit : là il employa les moyens les plus propres à propager la religion des infidèles. Papgen, le plus jeune frère de Sempad, ischkhan de Sisagan, se rendit promptement auprès de lui. C'était un inconstant, qui livrait son imagination à toutes les chimères des songes ; il s'était mis dans l'esprit qu'on voulait le prendre pour le faire mourir, pour lui enlever son héritage paternel, dont son frère Isaac (Sahak) était le seul chef ; ce qu'il regardait comme une injustice. Nesr ouvrit aussitôt les portes de l'espérance, et adroitement, avec peu de paroles, il lui promit de le remettre en possession de son héritage. Il ne négligeait rien, en même temps, pour attirer auprès de lui son frère Isaac, afin de pouvoir tromper chacun d'eux et les retenir prisonniers. Nesr appela aussi à Nakhidchévan Isaac (Sahak), seigneur de Siounie, en lui faisant entendre des paroles de joie et de bienveillance. Celui-ci, extrêmement soumis, regarda cette invitation comme un ordre royal, se mit en route et se rendit promptement auprès de Nesr avec beaucoup de présents. Frappé de léthargie dans tous ses sens, il fit un pacte avec les enfers, sans consulter la sagesse qui était dans son cœur, sans faire usage de son esprit et sans considérer le résultat de cette action. Nesr les ayant avec adresse trompés tous les trois et attirés auprès de lui, se disposa à les amener malgré eux, chargés de fers, dans la métropole Tovin. C'était, leur disait-il, pour qu'ils fussent dans un endroit sûr et qu'on pût leur procurer plus facilement ce qui était nécessaire à chacun d'eux.
