Chapitre XLVIII.
Dans ce temps-là le général et grand ischkhan Gagig Ardzrounien pria instamment le roi Sempad de venir auprès de lui pour régler ce qui concernait la ville de Nakhidchévan,1 parce que son aïeul, son père, toute sa race et toute sa famille ayant toujours gouverné et administré cette ville, il regardait comme une usurpation faite à son préjudice la possession qu'on en avait accordée à un autre que lui. Mais, comme avant cela le roi en avait fait don à Sempad, ischkhan de Sisagan, qui s'était acquis beaucoup de gloire en rendant toujours vains les projets des ennemis du dehors, et qui remplissait avec fidélité tous les devoirs exigés par l'obéissance, il ne voulut pas recevoir l'écrit de Tischkhan ; il ne lui envoya point de présents, et, au lieu de le traiter avec honneur, il l'accabla de mépris. Alors l’ischkhan Gagig, entraîné par son aveuglement, tint de perfides discours contre le roi ; puis il prépara beaucoup de dons et de présents magnifiques, et se mit en marche pour aller trouver en Perse l'osdigan Youssouf ; s'étant présenté devant lui, il lui offrit ses présents, et ensuite, avec perfidie et arrogance, il éleva la voix pour être confirmé dans la dignité de roi. L'osdigan le reçut avec plaisir, et lui donna une couronne royale avec des présents et des ornements royaux, pour empêcher la rupture de leur alliance. Ils agissaient ainsi en cachant cependant à tout le monde, chacun de son côté, leur perfidie. Ils agissaient secrètement comme les serpents qui, s'introduisant dans les fentes des pierres, ne font pas de mal à l'instant même, mais qui atteignent réellement leur but.
Les démarches faites par Gagig (Kakig) Ardzrounien auprès du roi Sempad et de l'osdigan Youssouf, au sujet de la possession de Nakhidjévan, et la reconnaissance de ce prince comme roi par Youssouf, eurent lieu en l'année 908. ↩
