Chapitre CXXXV.
Toutefois le roi envoya à Môsès un message pour rallumer le feu de la fidélité, qui s'était éteint, et pour obtenir que ce rebelle revînt à l'obéissance et vécût en paix et dans la tranquillité. Mais celui-ci répondit par des lettres qui respiraient la plus fière et la plus grande arrogance. Alors le prudent et ingénieux roi et l'ischkhan Isaac (Sahak) animèrent leurs troupes, composées d'hommes célèbres et choisis, armés de flèches, d'épées et de lances affilées ; ils les disposèrent en avant et sur les côtés, et elles brillaient comme un incendie. On s'approcha rapidement du bord de la vallée dans laquelle s'était fortifié Môsès, avec les forces qu'il avait réunies. Une grande et violente commotion se fit entendre ; la terreur et la crainte se répandirent parmi les troupes de Môsès, qui, voyant la supériorité de l'ennemi, prirent promptement la fuite, se débandèrent de tous les côtés, s'éloignèrent, se dispersèrent et laissèrent Môsès seul. Celui-ci se hâta de gagner une petite vallée située du côté de l'occident, d'où il prit précipitamment la fuite et se rendit dans la province de Siounie, auprès de l'ischkhan Sempad, espérant trouver le moyen de l'émouvoir par le récit de ses craintes. Pendant que le roi était dans la province d'Oudie, occupé à concilier et à soumettre tous les rebelles et les brigands du pays, Môsès fit rapidement un mouvement en avant et se dirigea vers la province de Sisagan : il avait l'intention d'aller trouver le grand chorévèque de Dzanark'h, et pensait que, par les bons offices et l'alliance de ce dernier, il parviendrait à se faire rétablir dans ses fonctions d'ischkhan d'Oudie. Cette entreprise eut une mauvaise issue : on en donna aussitôt avis au roi, qui résolut de se mettre promptement à la poursuite de Môsès. Il monta à cheval, l'atteignit, livra un violent combat aux guerriers qui l'accompagnaient, s'approcha de Môsès lui-même, qui était couvert d'an casque de fer, fondit sur lui, le frappa sur la tête avec son glaive, partagea son casque en deux et le renversa par terre. Il revint ensuite sur ses pas, conduisant avec lui le rebelle, qui était devenu son prisonnier ; puis il lui fit brûler les yeux jusqu’à le rendre aveugle. Môsès subit ainsi le même traitement qu'il réservait au roi, et depuis ce temps il ne put jamais recouvrer la santé.
